
Manuel Valls a prononcé son discours de politique générale mardi après midi devant l’Assemblée nationale. Le Premier ministre a détaillé un certain nombre de mesures en faveur de l’emploi. Et la réorganisation de l’administration de la France. Ce discours a été suivi de nombreuses réactions.
Jérôme Dubus, secrétaire national de l’UMP
On nous avait promis qu’avec Manuel Valls à Matignon, le réalisme économique allait enfin pointer son nez au sein de la majorité. On nous avait décrit un Manuel Valls à la droite de la gauche, dépourvu de l’infantile utopie caractéristique du PS et de ses gentils alliés. On nous avait demandé de l’indulgence pour celui qui reprenait le gouvernail de son incompétent prédécesseur. Après ce discours de politique générale, ceux qui croyaient encore au redressement de la France n’ont que leurs yeux pour pleurer. Rien de nouveau sous le soleil : Manuel Valls s’inscrit droit dans le sillage illisible et incohérent du Président de la République. Nous avons assisté à la lecture pure et simple du programme de ce dernier. L’inefficient Pacte de Responsabilité reste en l’état et aucune de ses mesurettes (soit les 30 milliards d’allégements espérés d’ici à 2016) ne fera réellement baisser le coût du travail. Pire : il s’alourdit d’un encombrant Pacte de Solidarité, destiné à creuser davantage encore notre déficit public critiqué par la Commission européenne et moquée par nos partenaires européens, à l’instar de la très sérieuse Fondation Bertelsmann. Comment promettre à l’UE 50 milliards d’économies sur trois ans et nommer dans le même temps un Europhobe averti à Bercy ? Comment envisager sérieusement de renégocier le calcul de ce déficit en promettant 500 euros de plus à chaque salaire équivalent au smic ? Ce flou, si nous n’y étions pas déjà habitués, peut laisser perplexe. Dans la situation d’urgence que nous subissons aujourd’hui, il est tout simplement indécent. Loin d’apporter des réponses, Manuel Valls suscite davantage de crainte et d’interrogations. Car le discours du Premier ministre, à l’image du couple Sapin-Montebourg révèle une schizophrénie patente et dangereuse pour le reste du quinquennat.
Christian Picquet, conseiller régional de Midi Pyrénées, Co-fondateur du Front de gauche
“Le discours de Manuel VALLS : enfumage et aggravation d’une politique en échec. Ce 8 avril, le Premier ministre aura expliqué au pays qu’il avait entendu son message. D’évidence, il n’en aura tiré aucune conséquence. Son discours de politique générale est resté placé sous les auspices du “pacte de responsabilité”, des cadeaux fiscaux qu’il aura encore étendu à l’avantage des entreprises, de l’amputation à la hache dans la dépense publique, de l’enfermement des collectivités territoriales dans le carcan d’une austérité drastique. Ce ne sont pas les mots sucrés adressés à l’électorat de gauche, ni les odes à la République qui auront émaillés le propos de Manuel Valls, encore moins les tirades sécuritaires de ce dernier qui y changeront quoi que ce soit. Comme ce ne sont pas les allégements de cotisations annoncés pour les salariés qui rééquilibreront un dispositif tout entier orienté vers le capital, d’autant qu’ils risquent de justifier la mise en cause rampante de notre système de Sécurité sociale. Sans même parler de l’étranglement envisagé des moyens de Régions auxquelles on veut imposer des fusions, ou encore de la suppression promise des départements, qui ne réconcilieront certainement pas les citoyens avec les institutions censées les représenter. Il faut dire la vérité, aura dit Manuel Valls. En effet ! La vérité consiste à dire que le chef du nouveau gouvernement se sera aujourd’hui borné à annoncer l’accélération d’une politique dont l’échec se mesure chaque jour au nombre de chômeurs ou de précaires, ainsi qu’aux difficultés croissantes de nos concitoyens, qui contrastent avec la progression insolente des dividendes des actionnaires. La gauche, celle qui a manifesté sa colère en faisant la grève des urnes les 23 et 30 mars, celle des militants et des élus ou encore celle des acteurs sociaux, ne sauraient par conséquent se reconnaître dans un tel gouvernement. Les députés du Front de gauche ont fait savoir qu’ils refuseraient de voter la confiance à une politique dont le “pacte de responsabilité” est la clé de voûte. De très nombreux parlementaires socialistes viennent de s’exprimer avec force pour un changement de cap. Les élus écologistes ne sont, quant à eux, plus prisonniers d’une solidarité contrainte par la présence de leurs ministres au gouvernement. Tous ceux-là peuvent et doivent unir leurs efforts afin qu’une politique enfin de gauche voit le jour, que l’on cesse de respecter les diktats d’un traité budgétaire qui enfonce toute l’Europe dans le marasme et la déflation, et que notre peuple se voit ouvert un chemin d’espoir. Une nouvelle majorité et un nouveau gouvernement peuvent demain se constituer, permettant à la gauche de retrouver son unité autour de ses exigences de justice et d’égalité. Il y a toutefois urgence, car l’autisme de l’exécutif, que manifestent les choix énoncés par Monsieur Valls, annonce de nouveaux désastres électoraux demain…”
La CGT
Après la sanction infligée à la politique conduite par François Hollande et le gouvernement Ayrault, les salariés attendaient un discours répondant à leurs préoccupations. Ce n’est pas le cas. Le Premier ministre s’inscrit dans les orientations précédentes et amplifie encore les mesures qui s’opposent à une relance économique et sociale en France. Il confirme et aggrave l’offensive lancée contre le travail. Dire que le pays ne pourra se redresser qu’en baissant massivement le « coût du travail » nous précipite un peu plus dans la crise. Le patronat a été entendu et servi. Le Premier ministre confirme l’austérité salariale dans le public comme dans le privé. Il annonce de façon précise de nouveaux milliards d’euros d’aides aux entreprises, encore une fois sans aucun contrôle ni engagement en termes d’emplois et de salaires. Le plan d’économie dans les finances publiques est synonyme d’une baisse des capacités publiques d’intervention sociale et économique, et d’une réduction des services publics et de leurs missions. Le transfert d’une partie des cotisations sociales vers la fiscalité au prétexte d’augmenter le pouvoir d’achat des salariés modestes est un leurre. C’est une baisse supplémentaire de la rémunération du travail. « Zéro charges » pour les salaires payés au SMIC, c’est condamner des millions de salariés aux bas salaires. Le salaire, c’est ce qu’il y a en haut de la feuille de paie, c’est ce qu’on appelle le salaire brut. Une partie est mutualisée pour financer les aléas de la vie, le vivre ensemble, notre politique de santé et de solidarité, l’autre partie est versée directement, le salaire net. Augmenter le bas de la feuille de paie sans augmenter le haut, c’est moins de sécurité sociale. La CGT portera vendredi prochain, lors de sa rencontre avec le Premier ministre, les revendications des salariés. Répondre aux aspirations des salariés et du monde du travail, c’est la condition pour sortir notre pays de la crise. La CGT appelle les salariés à ne pas se laisser faire et à manifester le 1er mai 2014.
Guillaume Cairou, Président du Club des Entrepreneurs
Nous saluons vivement la réaffirmation de l’objectif de réduction de 30 milliards d’euros du coût du travail d’ici 2016 du Pacte de responsabilité. Nous sommes particulièrement heureux de la concrétisation de la simplification du régime fiscal des entreprises. Manuel Valls va, par ses annonces, permettre de remédier à une situation ubuesque qu’il ne faut pas oublier : les charges supportées par les entrepreneurs que nous sommes ont progressé de plus de 58% en France entre 1996 et aujourd’hui, contre 25% en Allemagne au cours de la même période. Pour faire simple, les charges patronales ont augmenté deux fois plus fortement en France qu’en Allemagne sur la même période. Je me félicite de cette baisse du coût du travail évoquée par le Premier Ministre. Nous l’attendons avec impatience. Cette annonce constitue à nos yeux le préalable indispensable au retour de la croissance et de l’amélioration de la situation de l’emploi dans notre pays.